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quarta-feira, junho 04, 2008

Pour faire le portrait d'un oiseau

Peindre d'abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d'utile pour l'oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l'arbre
sans rien dire
sans bouger ...
Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider.
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut
pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport avec la réussite du tableau.
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau.
Faire ensuite le portrait de l'arbre
en choisissant la plus belle de ses branches pour l'oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter.
Si l'oiseau ne chante pas
c'est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s'il chante
c'est bon signe
signe que vous pouvez signer.
Alors vous arrachez tout doucement une des plumes de l'oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.

Jacques Prévert "Paroles"

3 comentários:

solange disse...

A ti, Nélinha Pintassilgo, dedico este poema! Será que te lembras?!!!

didium disse...

Un tableau vivant, et il y en a.
Nous regardons un vrai tableau et il nous semble qu'il sagit de la réalité!
C'était beau, que nous écrivions ici, par exemple, les paroles d'une chanson d'Édith Piaf. Qu'en penses toi???

solange disse...

Vraiment d'accord!
Depois de ter visto o filme em dvd, "La vie en rose", que me emprestaste, ainda fiquei a gostar mais da "piaf" (un moineau), que apesar da difícil e triste vida que teve, não deixou de cantar.
Engraçado teres-te lembrado dela ao leres este poema de Prévert, que me faz lembrar os tempos da faculdade, em que eu e a Nélinha "Chardonneret" analisávamos os poemas ao pormenor e nos deliciávamos, sobretudo com os do J. Prévert, o meu preferido.